Femme, maman et anorexique
Voilà un sacré triplé gagnant.
J’ai vécu l’anorexie seule, à deux puis à trois. Et il beaucoup plus facile de vivre cela seule, parce qu’on n’a pas besoin de se justifier sur nos apports, notre besoin vital de nous dépenser… C’est le bonheur de l’anorexie : même pas d’ennemi en vue !!
Quand j’ai commence à sombrer, je vivais encore chez mes parents. Ils ne l’ont pas vu tout de suite, je mangeais souvent seule dans ma chambre devant Beverly Hills, deux yahourts 0%, avant d’aller danser 4 heures en boite….
Quand mon père a compris ce qui se tramait, ça a été très rude, pour la bonne raison que non, je n’etais pas malade ! J’etais au top ! J’etais mince (maigre), 1er de promo dans une grande ecole de commerce, j’avais des amis (enfin, de moins en moins, je leur faisais peur)…. Je me rappelle que le matin, mes parents se levaient avant moi, et j’attendais de les entendre prendre leur petit dej pour me lever et courir sur place dans ma chambre, en essayant de ne pas faire de bruit.. et si mon père se rendait compte de quelque chose, je l’entendais monter, et hop je sautais dans mon lit… Je ne prenais mes « repas » aux mêmes heures qu’eux, j’evitais tout contact…
Avec un amoureux :
Quand j’ai connu mon amoureux, j’etais dejà dans un trouble alimentaire, je me gavais le matin et ne mangeais plus rien de la journée… J’ai du adapter un peu, histoire de dejeuner ou diner avec lui.
Je l’ai connu quelques moi savant de sombrer, donc la Melanie pulpeuse qu’il a connu et qui lui a plu n’est pas restée longtemps…
On s’est installé ensemble, je cuisinais pour lui, des plats bien gras, des desserts bien caloriques, que je mangeais par procuration pendant que je mangeais mes feuilles de salades. Il était inquiet, d’autant plus que mon père lui mettait une sacrée pression, pour me sortir de là…
Et soyons honnêtes et crues : quand on fait de l’anorexie, le metabolisme est tellement lent que le digestion est très compromise…. Avec son lot de flatulence car tout fermente dans l’intestin. C’est loin d’être romantique.
Idem : pas d’hormones ; pas de libido. Fatigue, irritabilité. Agressivité… mon dieu, qu’est ce que j’ai été odieuse. Mais il est resté, malgré tout.
Egalement, pour les sorties d’amoureux, c’est inexistant : peur du repas, donc idem pour les sorties avec les amis.
Pour le sport ? pas de problèmes, je me levais en pleine nuit pour faire du stepper, et j’en refaisais en repassant devant la télé. Oui oui, je faisais du stepper en repassant ! et oui je suis tombée plusieurs fois !
Une vie de couple pas très glamour en définitive….
Si vous etes en couple et que vous souffrez de troubles alimentaires, et que votre binome reste avec vous malgé tout, vous pouvez l’épouser !!!
Avec un enfant :
Reussir à tomber enceinte tout en souffrant d’anorexie est en soi un petit miracle !
J’ai été anhemorée rapidement, mais sous pilule c’est transparent. C’est quand je l’ai arretée dans le projet d’avoir un enfant que les choses se sont compliqueés. Je n’avais pas de règles… j’ai été suivie par un excellent gyneco, j’ai tenté differents traitements sans effets. Et enfin j’ai été mise sous pompe FSHLH, et dans un lacher prise total, je suis tombée enceinte.
J’ai eu une merveilleuse grossesse, un afflux hormonal que je n’avais pas connu depuis 10 ans, sur un petit nuage. J’ai evidemment pris le minimum de poids necessaire…
Ma merveilleuse petite fille est née pile poil dans les temps, un beau bébé !
Tout était parfait… sauf que je n’avais pas anticipé la chute d’hormone terrible, le fait que donner le sein était épuisant etc…. les 1ers mois ont été éprouvants, comme pour toutes les mamans mais puissance au carré compte tenu de la déchéance de mon corps…. Et j’ai vite perdu du poids, qui, apres analyse, a du reactivé mon foutu gène de l’anorexie et c’est reparti de plus belle….
Concrêtement, je faisais le menage à fond pendant mon conges mater, matin et soir, j’allais faire deux promenades en landau de 2h, je prenais pas le temps de manger et ma fille n’a jamais fait la sieste. J’etais epuisée, mais je tenais. Je tenais.
Quand j’ai repris le boulot, j’ai repris un rythme. Mes collègues ne mangeant pas à la cantine, ben moi non plus. Je me suis inscrite à la salle de sport et hop, tous les midis j’y allais.
Par contre j’ai toujours tenu à faire « semblant » à la maison, le diner ect… pour donner le bon exemple à ma fille.
Et au niveau de l’alimentation, je fais tout le contraire pour ma fille que ce que j’ai vécu. Elle mange ce qu’elle a envie, elle s’auto-regule. Même pour les bonbons, elle sait en prendre et s’arreter naturellement au bout de deux-trois. Quelle chance, je l’admire, j’admire également mon mari qui mange ce qu’il veut quand il veut, en fonction de sa faim et de ses envies, son organisme s’auto-regulant. En même temps, il vient d’une region où la nourriture est riche et grasse, où la notion de régime n’existe pas, où on ne trouve pas de 0% dans les magasins, pas de gelules minceur… Il n’a jamais connu de regimes et a toujours suivi son instinct. Il est naturellement fin et musclé.
Je l’ai envie en toute bienveillance…. Et si c’était ça la clef du bonheur alimentaire, savoir écouter ses envies sans avoir le mental qui s’en mêle parce que ça n’a jamais été un sujet, la bouffe….
Le but de cette remission, c’est evidemment de retrouver la santé. Et aussi une relation saine avec la nourriture, pour que justement ce ne soit plus un sujet, mais juste une activité neutre, comme aller aux toilettes, se laver les dents. Je mange parce que j’ai faim, parce que j’en ai envie. Point final.
Et pour partager les même repas. Aujourd’hui ma fille à 9 ans. Elle voit les choses, elle voit que je ne mange pas la même chose qu’elle et son père, sous couvert de mes intolerances alimentaires (gluten depuis mon debut d’anorexie, et d’autres qui se sont cumulés à cause de mon intestin qui s’est détériorés à cause de la famine….).
C’est un autre challenge. Une chose à la fois.